Le nouveau recueil de Mapou Libelibè, Bout Souf (Éditions Papye9), déploie en 99 pages une exploration poignante de cette sensation d’inconfort au moment de la respiration (dyspnée). À travers une langue ciselée, l’auteur tisse des métaphores puissantes pour évoquer la misère, l’amour et la révolte.
Poète et médecin, Mapou Libelibè nous plonge dans une double dynamique : celle du cri et de la réparation, entre une tanière où il s’enrage et une clinique où il soigne.
« Tout sa mwen ka di masak tounen flè dizè nan peyi isit pèsonn pa okouran doulè krèv kè ». Ces mots cinglants ouvrent une réflexion sur les douleurs inexprimées du peuple haïtien. L’auteur nous interpelle sur la précarité d’une nation en quête de souffle, où l’on court « sous les balles » comme des athlètes aux Jeux Olympiques.
Le poète ne s’arrête pas à la dénonciation. Il se veut aussi chantre de l’amour et de l’espoir. À travers ses vers, il célèbre la beauté et la résilience, comme dans ce passage : « flè papiyon tankou w se nan lalin anba zetwèl se nan rèv – bafon lanmè omeli sa pran chè ». Ces images riches et lumineuses transcendent la noirceur pour offrir une lumière d’espoir.
« Lakou a leve nan yon limyè boukan-boukan / K ape pawaze tou dousman / Nan yon koulè lespwa ki fin wè mò nan wotè pik makaya » : ici, Mapou Libelibè appelle à une renaissance, à une construction collective dans un pays marqué par l’injustice et la souffrance. Cette allégorie d’un « lakou » qui se relève incarne l’espoir d’une société reconstruite sur les ruines de la douleur.
Le recueil est aussi une célébration intime de l’amour : « tout pwezi mwen se lè ou kale je nan je mwen se lè zye mwen kale nan zye ou pou w ap pran jòf vag lanmè ou k ape danse anba po mwen ». L’amour y est présenté comme une communion, un élan vital capable de défier les réalités brutales.
Mapou Libelibè, avec « Bout Souf« , se positionne comme un véritable « Leroy » de la poésie créole contemporaine. Entre la douce mélodie de l’espoir et la rage face à l’injustice, il pousse la langue créole à ses limites, traçant des chemins de résistance, de soin et de réconciliation. Sous sa plume, le souffle devient un acte de survie, un cri du cœur et une promesse d’avenir.Entre épuisement physique, psychologique et émotionnel, le chaos est comme souffle coupé. Cette violence imprévisible des gangs représente un étranglement collectif, empêchant la société de reprendre son souffle. Plus loin, les milliers de personnes déplacées, errant sans abri ou sécurité, incarnent l’essoufflement d’une nation. On est à bout de souffle, ainsi crie l’auteur.
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