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Violence obstétricale : Sarah témoigne de son traumatisme indélébile

À la recherche de soins médicaux essentiels, Sarah (nom d’emprunt), une femme de 18 ans, se rend à la maternité Isaïe Jeanty, connue sous le nom de Chancerelles, pour une échographie obstétricale. Comme beaucoup de femmes en Haïti, elle doit jongler avec de graves contraintes financières. Après des heures d’attente, elle entre enfin à la clinique où le médecin et plusieurs stagiaires l’attendent.

La question du médecin est directe : « Avez-vous déjà eu des relations sexuelles ? » Sarah répond dans le négatif, sa réponse est honnête. Cependant, la réaction du médecin va au-delà de l’inacceptable. Il lance, sur un ton familier et inapproprié : « Antouka, se pa mwen k ap devyeje w.. (Dans tous les cas, ce ne sera pas moi qui te de-de-enthe..) « . Les stagiaires présents ont éclaté de rire, ajoutant à l’humiliation que Sarah ressent en ce moment. Ce jour-là, elle s’est sentie « théoriquement violée », selon ses propres mots. Aucun des professionnels présents n’a demandé son consentement pour l’examen auquel elle s’est soumise sous leurs yeux. Elle quitte le bureau, submergée par la honte, une expérience remarquable qu’elle ne pourra jamais effacer.

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Photo : Courtesies de PIH / Paj Facebook Zanmi Lasante

Un nouveau choc à Mirbelais

Quelques années plus tard, en 2022, Sarah, maintenant infirmière qualifiée, continue de faire face à des difficultés financières malgré sa position dans le secteur de la santé. Elle souffre d’un problème gynécologique nécessitant une intervention chirurgicale, mais ne peut pas se permettre de se faire opérer dans un hôpital privé de Port-au-Prince. Elle a ensuite choisi l’hôpital universitaire de Mirebalais (HUM), où elle espérait recevoir des soins adéquats.

Cependant, lors d’une consultation en 2021, une nouvelle déception l’attend. Un médecin l’interroge sur sa santé en public, sans tenir compte de sa vie privée. Pire encore, lorsqu’il s’agit de demander du sang pour l’opération, le professionnel de la santé lui répond sèchement : « Ce n’est pas pour moi que les gens viendront donner leur sang ». Dévastée par l’attitude du personnel médical, Sarah décide de retourner à Port-au-Prince, abandonnant temporairement l’idée de l’opération.

Elle a fini par subir l’intervention le 18 août 2022. Cependant, même pendant sa convalescence, la souffrance persiste, amplifiée par l’indifférence du personnel. Malgré une douleur post-opératoire atroce, on lui refuse des analgésiques, et une infirmière se permet même de la traiter de menteuse lorsqu’elle exprime sa douleur. Dans cette atmosphère de mépris, Sarah se sent négligée, comme si sa souffrance n’avait pas d’importance.

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Photo Google

Un traumatisme indélébile

L’expérience de Sarah est emblématique de la violence obstétricale à laquelle sont confrontées de nombreuses femmes haïtiennes. Au-delà de la souffrance physique, c’est la dignité de ces patients qui est souvent bafouée, un problème systémique dans les institutions médicales du pays. Que ce soit par des remarques inappropriées, des examens non consensuels ou un manque de respect, ces femmes se retrouvent dépossédées de leur corps et de leur pouvoir de décision. Comme Sarah le confie, ces moments l’ont profondément marquée, et les conséquences psychologiques sont tenaces.

Violence obstétricale : Ruth Dormeus et Floria Gédéon proposent des solutions

https://hpost5.com/violence-obstetricale-ruth-dormeus-et-floria-gedeon-proposent-des-solutions/

Son témoignage met en évidence une réalité qui est trop souvent ignorée : la violence obstétricale en Haïti est un problème urgent. Il est nécessaire que les professionnels de la santé soient mieux formés, non seulement dans les techniques médicales, mais surtout dans le respect des droits des patients. Sans consentement éclairé et sans considération de la dignité humaine, ces institutions continuent de perpétuer un système dans lequel la souffrance des femmes est minimisée, voire normalisée.

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Sarah, dans son témoignage, appelle à une sensibilisation collective et à de profondes réformes au sein du système de santé haïtien. Il est crucial que les patients soient écoutés, respectés et accompagnés avec compassion, afin d’éviter que ces traumatismes ne se reproduisent pour toujours.

Ce travail est réalisé en acollaboration avec le PACIT, grâce au financement de la Mission Inclusion (MI) et les Affaires Mondiales Canada (AMC).

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Ansky Hilaire, écrivain haïtien contemporain, explore l'identité et la culture haïtienne à travers ses œuvres littéraires et poétiques. En 2020, il a remporté le prix de Palmes Magazine de l’écrivain de la région. Juriste, journaliste, enseignant et titulaire d'un certificat en Rédaction de propositions de Subventions (ACP) au programme Transcultura de l'UNESCO.

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